La récente arrestation et détention de Prospère, géologue licencié de la Société Équatoriale des Mines (SEM), soulève de nombreuses questions sur l’étendue des magouilles qui continuent d’enrichir quelques privilégiés au détriment de l’État gabonais. Cette arrestation intervient dans un contexte où les nouvelles autorités avaient promis d’assainir les pratiques de cette entreprise stratégique, mais où le statu quo semble malheureusement persister.
En 2023, l’ancien président du Conseil d’administration de la SEM, Michel Mboussou, avait déjà alerté Sylvestre Chen Mezui M’Obiang, alors ministre des Mines, sur les malversations dans les sites d’exploitation. Plusieurs millions de francs CFA échappaient, selon lui, aux caisses de l’État, pour atterrir dans les poches de quelques orpailleurs qui exportaient leur production clandestinement vers des marchés étrangers, notamment Dubaï. Le président regrettait alors l’absence d’un comptoir d’achat contrôlé par la SEM, pointant du doigt la complicité de commerçants véreux.
Aujourd’hui, malgré les nouvelles autorités, des rapports et témoignages indiquent que ces pratiques perdurent. Toute tentative de dénonciation est étouffée, et ceux qui osent en parler subissent des représailles sévères. Prospère, géologue respecté et impliqué sur le site de Minkébé, en est un exemple criant. Licencié pour avoir essayé de lever le voile sur les magouilles, il aurait été ensuite interpellé par des agents de la Direction Générale des Recherches (DGR) à Oyem et placé en cellule, sans justification claire.
Des agents des forces de l’ordre et ceux de l’administration centrale sont dans ces trafics illégaux d’or et d’autres ressources.
Selon des sources proches, les accusations portées contre lui seraient purement fallacieuses et orchestrées par des individus bien placés dans cette « nébuleuse minière » pour faire taire toute opposition. Cet homme, père de famille, est aujourd’hui privé de sa liberté sans même comprendre les charges retenues contre lui.
Le trafic illégal de l’or brut au Gabon est une activité extrêmement lucrative, tant pour les orpailleurs que pour les fonctionnaires corrompus de l’administration centrale. Une mission diligentée avec le ministère de l’Intérieur a permis de mettre à jour la forte complicité entre les agents des forces de l’ordre et ceux de l’administration centrale dans ces trafics illégaux d’or et d’autres ressources. Il s’agit en l’occurrence des préfets, des sous-préfets, des agents du ministère des Transports, des gendarmes et des douaniers à la frontière. Ces derniers seraient impliqués dans le trafic illégal de l’or brut, estimé à 75 milliards de francs par an.
Cette affaire nous interpelle tous. Elle doit remonter aux plus hautes autorités, qui ont un devoir de justice envers ce compatriote. Prospère doit pouvoir s’exprimer librement et contribuer à dévoiler l’ampleur des détournements qui grèvent notre économie. Il est plus que temps que des mesures fermes soient prises pour éliminer les malversations au sein de la SEM et rétablir la confiance des Gabonais en leurs institutions.