Artiste musicien, le Roi Téké est l’un des rares musiciens gabonais qui a réussi à s’impose dans un genre musical purement traditionnel. Descendant du roi Makoko, son art lui a été légué par ses ancêtres.
Pour vous, nous l’avons rencontré.
D’où vous vient le nom de Roi, êtes-vous descendant d’une ligné royale ?
Ce nom m’a été donné sur Facebook par un ami militaire congolais, mais je ne l’ai jamais vu. Bien avant, je me surnommais La vedette des plateaux. C’est ce dernier qui m’a demandé de le changer en Roi Téké, ce que j’avais trouvé génial car, spirituellement, à distance, il avait vu ce que je ne voyais pas.
En effet, Roi Téké vient de mes ancêtres. Je suis le descendant de Makoko, le seul Roi des Batéké depuis la nuit des temps, me disait ma grand-mère, chef de terre de Léconi.
Ne peut être Roi Téké au Gabon qu’un Batéké des plateaux. J’ai été élevé par ma grand-mère Olangui Abrabaga Anglini Madeleine depuis l’âge de 6 ans. Cette dernière n’avait jamais enfanté de sa vie.
Elle incarnait le pouvoir mythique ancestral de ses pères Apikekolo Taty, Ndjigui-Ndjigui et Lafoumou, tous chefs de terre Leconi et descendants de Makoko avant ma naissance.
A leur mort, ils ont laissé ce pouvoir mythique ancestral à leur fille aînée et pourtant elle avait des petits frères comme Kafouma qui avait hérité de ce pouvoir après sa mort, alors que j’étais encore adolescent. Aussi deux autres frères et plusieurs sœurs, Youmou, Lebesgue, Ondina, Kampala, Ampabi, Kapoye pour ne citer que ceux-là. Tous sont mes grands-pères et mes grands-mères. Ils sont encore en vie. Ma grande-mère est la seule femme Téké à avoir foulé le sol de la réserve de Djobi dans les plateaux Batéké, et de l’avoir incendié, ce qui était strictement interdit aux femmes .
Elle est également la seule femme des plateaux qui avait le pouvoir de prédire une bonne récolte ou pas des chenilles, du manioc ou de l’igname : c’était juste sa parole contre le ciel et la terre. Un héritage mystique qu’elle m’a transmis.
Pouvez-vous nous décrire exactement ce qu’est votre musique ?
En ce qui concerne ma musique, je considère qu’elle est hors du commun, car elle relève simplement de la tradition ancestrale et de la spiritualité.
Je m’inspire de mes us et coutumes, je fais dans la pure tradition avec un mélange de modernité.
C’est de l’Afrobeat-Téké Music, un terme donné par l’un de mes frères des Plateaux, le docteur Gustave Ololo qui vit en Afrique du Sud et qui s’était appuyé sur une de mes chansons issue du rythme (Royal Olamagha Ategue) que mon ancêtre Makoko chantait et dansait de son vivant et dont je n’ai pas encore fait la promotionnais. Je la chante cependant déjà lors de mes prestations. C’est d’ailleurs avec cette chanson que j’avais brillamment validé le casting en prélude à la fête des cultures et au festival Gabon 9 provinces 2017, au ministère de la Culture, devant les artistes tels qu’Arnold Djoud, Alain Randy, Angèle Assélé, qui représentaient le jury.
Mon idéal est de ramener la jeunesse gabonaise en perdition sur les pas de nos ancêtres. C’est mon devoir de préserver l’image de nos ancêtres, car le Gabon est un pays royal, du nord au sud, de l’ouest à l’est et ce, depuis la nuit des temps. Je suis le seul Roi traditionnel qui nous reste au Gabon, après les trois rois de la baie qui sont Denis Rapontchombo, Akama Mba, et Makoko.
Vous venez de faire tabac dans le Woleu-Ntem, aujourd’hui vous préparez une tournée à l’étranger. Quel est le secret de cette percée ? Mon seul secret est le fait d’être le dépositaire authentique de nos us et coutumes. Mon style musical et vestimentaire qui s’appuie sur la tradition fait que je sois apprécié de tout le monde. Les Woleu-Ntemois m’ont surnommé la Mascotte du Gabon lors du festival Gabon 2017/2018, car très attaché à ma tradition.
Et pour la petite histoire, je suis le seul artiste Altogovéen qui a eu le privilège d’être invité au dernier concert géant « Grand Nord » au Collège Ntchoréré. C’était à mes tout débuts et pourtant, ce festival était très fermé aux autres ethnies. Mais grâce aux valeurs traditionnelles que j’incarne, j’ai pu partager cette scène avec les artistes traditionnels du Woleu-Ntemois.
N’empêche que beaucoup de personnes disent que ce sont vos liens avec le chef de l’Etat qui vous ouvrent les portes ?
Moi, proche du chef de l’Etat ? Pitié, j’aurais fait partie des artistes qui ont été invités à Franceville et au 54e anniversaire du PDG au Jardin botanique de Libreville.
Je n’ai jamais eu ce privilège. Nous connaissons tous les artistes qui ont été invités, ce ceux qui chantent et dansent à moitié nus.
Il me semble que nous, les artistes qui font dans le genre traditionnel, n’avons malheureusement pas de place dans ce genre d’événements.
Un dernier mot ?
Comme dernier mot, je ne peux que remercier mes ancêtres, mes grands-parents, mes génies qui m’accompagnent souvent sur scène et tous ceux qui me soutiennent, sans évidemment oublier le magazine Super Star.