À Ntoum, on a voté… ou plutôt, on a déplacé les votants.
Pierre J. Nsala Ondong, ancien candidat aux législatives dans le 1er arrondissement, a brisé le silence après les résultats du 2 novembre. Et il ne mâche pas ses mots : « Ce n’était pas une élection, c’était une transhumance nationale ! »
5,38 % de courage face à la machine
Pour une première participation, l’homme a tenu tête à trois partis bien huilés, dont la fameuse machine du PDG. Résultat : 5,38 % pas un score, mais un symbole.
Un chiffre modeste, certes, mais arraché à la peur, à la résignation et à la pensée unique.
« Ces 5,38 %, ce sont des Gabonais qui n’ont pas vendu leur conscience, même pour un tee-shirt ou un sac de riz », lâche-t-il, piquant.
Quand la démocratie devient un transport en commun
Le ton monte vite dans sa déclaration : Pierre Nsala Ondong dénonce la transhumance électorale ce sport national où les électeurs voyagent plus que les idées.
Des bus entiers auraient fait la navette, au mépris du code électoral, pendant que certains dormaient encore sur leurs cartes d’électeurs locales.
Malgré les interdictions officielles, le ballet des bus a continué : « au vu et au su de tous ». Et, bien sûr, aucune sanction. Comme toujours.






Ici au 1er arrondissement de Ntoum lors du deuxieme tour des législative : la transhumance électorale ce sport national où les électeurs voyagent plus que les idées.
Une légitimité qui se mesure à la taille du bus
Avec 29,96 % de participation et 70 % d’abstention, on peut difficilement parler d’un “plébiscite populaire”.
Mais qu’importe : certains s’en félicitent, brandissant fièrement leurs 65 % de “victoire” obtenus sur… moins d’un tiers du corps électoral.
« À Ntoum, le député élu n’a même pas 15 % des voix des vrais résidents. C’est une élue des transhumants pour les habitants », déclare Nsala Ondong, acide.
Quand on vire pour avoir voté “mal”
Et comme si la comédie électorale ne suffisait pas, une femme, mère de trois enfants, aurait été virée de la mairie simplement pour avoir soutenu publiquement Nsala Ondong.
Pas d’autre crime que celui d’avoir cru à une idée différente.
« Voilà le prix du courage politique à Ntoum », soupire-t-il, tout en lançant un appel à solidarité : « Pour ceux qui veulent l’aider, voici son numéro… » Un acte rare, humain et politique à la fois.
Oligui interpellé : bâtir la République, oui, mais avec des citoyens libres
L’ancien candidat ne se contente pas de dénoncer : il interpelle directement le président Brice Clotaire Oligui Nguema.
Message clair : on ne construit pas une République avec des routes et des bâtiments, mais avec des lois justes, des institutions solides et des citoyens libres.
« Votre mandat réussira si vous formez une génération de citoyens capables de dire non, même face à la peur », martèle-t-il.
Abstention, transhumance, résignation : la Sainte Trinité de la politique gabonaise
Pierre Nsala Ondong enfonce le clou : tant que les élections seront des spectacles financés par les puissants, la démocratie restera une illusion collective.
Et l’abstention, loin d’être un désintérêt, devient une révolte silencieuse : « 11 860 électeurs ont dit non à la supercherie, à leur manière. »
“Osons faire peur à la peur”: le nouveau slogan anti-système
L’homme conclut son texte sur une note qui sonne comme un manifeste :
« Avec vous et pour vous, je suis désormais engagé en politique. C’est maintenant que ça commence, sans peur ni compromission. Que vos choix reflètent vos espoirs, et non vos peurs. »
Une citation de Mandela, une promesse de combat, et surtout un ton qui tranche avec le discours aseptisé de beaucoup d’ex-candidats.
À Ntoum, les élections sont peut-être terminées, mais la bataille pour la dignité politique vient à peine de commencer.
Et si la démocratie devait renaître, ce serait peut-être grâce à ces 5,38 % ceux qui ont osé voter avec le cœur, pas avec la peur.












