Le Gabon s’apprête à franchir une étape décisive de son histoire avec la perspective d’adopter une nouvelle constitution. Le Président de la transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, espère ardemment un vote favorable au « oui ». Cependant, l’attitude ambiguë de certains de ses alliés de premier plan, qui semblent hésiter à expliquer les enjeux de cette réforme au peuple gabonais, pourrait mettre en péril cette initiative. Plusieurs proches du Président, pourtant placés à des postes stratégiques, se distinguent par un silence qui s’apparente à une trahison. Ce silence contraint le Président Oligui, malgré ses lourdes responsabilités à la tête de la transition, à mener seul le combat pour assurer la réussite de ce scrutin.
De nombreux alliés, nommés à la tête d’importantes institutions ou au sein du gouvernement, illustrent parfaitement cette duplicité. Tantôt favorables au « oui », tantôt au « non », ils semblent jouer sur tous les tableaux, laissant le Président presque seul sur le terrain. Cette attitude est également perceptible chez certains chefs de partis et activistes, dont l’absence durant l’avant campagne ne passe pas inaperçue.
Seuls quelques kounabelistes à l’attente d’un strapontin soutiennent inlassablement les actions du Président, plaidant avec ferveur pour le « oui ». Néanmoins, ces voix isolées peinent à dissimuler l’indifférence de nombreux responsables, qui, au lieu de mobiliser activement, semblent attendre de récolter les fruits de la victoire, tout en se cachant derrière le respect strict des lois, qui imposeraient d’attendre l’ouverture officielle de la campagne.
Le peuple gabonais, qui a un accès limité aux détails de la réforme, mérite des explications claires et compréhensibles, comme le font Geofroy Foumboula, Marc Ona Essangui et quelques rares intellectuels gabonais favorables à cette nouvelle constitution. Or, ceux qui, en raison des avantages ou du soutien reçus, devraient être reconnaissants envers le Président et promouvoir le « oui » se montrent soit silencieux, soit se perdent dans des discours académiques inaccessibles au citoyen ordinaire. Ce manque d’effort pédagogique de la part de ceux qui prennent néanmoins la parole, que ce soit sur le terrain ou dans les médias, risque d’accroître la méfiance du public.
Attendre le lancement officiel d’une campagne pour informer et convaincre n’est pas une position normale. Dans les pratiques démocratiques et les contextes de réformes importantes, il est commun pour les partisans de préparer le terrain en sensibilisant la population bien avant la campagne officielle, afin de répondre aux préoccupations et d’assurer une compréhension préalable des enjeux. En France, par exemple, des personnalités comme François Mitterrand, Valéry Giscard d’Estaing et Jacques Chirac n’ont pas attendu pour défendre subtilement leurs réformes. Ils ont anticipé la mobilisation populaire par des échanges et des interventions médiatiques qui, sans enfreindre la loi, permettaient de créer un climat de confiance et de compréhension.
Les membres du gouvernement tous comme ceux des grandes institutions se distinguent par un silence qui s’apparente à une trahison
Ce silence de la part des alliés du Président Oligui est incompréhensible et inquiétant. Ceux qui devraient porter le message de la réforme et sensibiliser le peuple à ses bienfaits se contentent d’observer ou de se réfugier derrière des discours trop complexes pour la majorité des citoyens. En se taisant ainsi, ces alliés semblent abandonner le Président, laissant le peuple dans le flou et le doute. Ce manque de soutien ouvert au projet constitutionnel pourrait être interprété comme une trahison, un signe de désengagement ou même de mépris pour le peuple. Ne pas prendre cette responsabilité dès maintenant compromet non seulement la clarté de l’enjeu pour la population, mais met aussi en péril le succès d’une réforme essentielle pour l’avenir du pays.
Bien que chef de transition, le Président Oligui s’investit sans relâche pour le « oui », non pas par intérêt personnel, mais certainement pour le bien du Gabon, ayant amorcé en un an de véritables transformations, là où le régime d’Ali Bongo avait échoué durant quatorze années. Cette réforme constitutionnelle pourrait offrir au Gabon une gouvernance plus solide et pérenne.
Pourtant, cette avant-pré-campagne révèle une réalité troublante : certains en qui Oligui a placé sa confiance semblent lui faire défaut, ne lui offrant qu’un soutien timoré, laissant le Président s’engager presque seul. Il est encore temps pour ces alliés de corriger le tir et de s’engager pleinement pour l’avenir du pays, à moins que leur véritable visage ne soit celui d’un opportunisme déconcertant. Peut-être assisterons-nous à leur réveil lors de l’ouverture officielle de la campagne, prévue pour la semaine prochaine.