Dans une vidéo poignante, le légendaire Ndong Mboula, figure incontournable de la musique traditionnelle gabonaise, a sollicité le soutien du Président de la Transition, le Général Brice Clotaire Oligui Nguema, pour venir en aide à son frère d’armes artistique, Sima Mboula, victime récente d’un AVC foudroyant. Une détresse qui illustre tragiquement la précarité dans laquelle sont plongés certains des plus grands artistes du Gabon, souvent laissés pour compte par un système qui semble préférer tourner le dos à ses monuments culturels.
« Bonjour le peuple, voici Sima Mboula, un monument de notre culture. Je suis venu lui rendre visite. Il est abandonné de lui-même. Monsieur le Président, Monsieur le Premier Ministre, si vous abandonnez ce monument, cela voudrait dire que c’est la même chose que vous me ferez. Venez en aide à ce dernier », a clamé Ndong Mboula, bouleversé par l’état de son collègue. Un appel de détresse, certes, mais aussi une critique acerbe de la manière dont certains artistes sont abandonnés à leur sort, malgré leur contribution inestimable à la culture gabonaise.
Dans une situation aussi déplorable, un constat désolant se dégage : la précarité de ces artistes, qui, tout au long de leur carrière, ont été privés de droits d’auteur, d’un véritable système de soutien et de véritables opportunités économiques. Les concerts, les spectacles, les publicités, sources cruciales de revenus pour ces artistes, ne sont pas toujours organisés de manière régulière. Ce qui donne accès à ces opportunités ? Pas nécessairement le talent, mais bien les relations privilégiées avec certains organisateurs. Une réalité cruelle qui met en lumière les failles du système et la nécessité urgente de réformes structurelles dans le secteur culturel.
Mais la responsabilité ne repose pas uniquement sur les épaules des autorités. Elle incombe également aux artistes eux-mêmes, qui, souvent, ne savent pas gérer les maigres revenus qu’ils génèrent. Au lieu d’investir dans des projets personnels et professionnels qui pourraient leur garantir une stabilité financière, ils préfèrent dépenser dans des futilités : soirées, alcool, et entourages douteux, pour finir par supplier de l’aide une fois leur fortune dissoute. Un cercle vicieux dont la sortie semble incertaine.
Et voici où l’ironie de la situation devient encore plus amère : alors que Ndong Mboula lance un appel désespéré pour sauver Sima Mboula, une association de sa province, dirigée par des membres de son propre clan, choisit d’investir des dizaines de millions dans un chanteur étranger. Un montant qui aurait suffi, ne serait-ce que partiellement, à permettre à Sima Mboula de recevoir des soins médicaux adéquats en dehors du Gabon, loin de l’indifférence qui semble marquer son traitement sur le sol national.
Alors que Ndong Mboula lance un appel désespéré pour sauver Sima Mboula, une association de sa province, dirigée par des membres de son propre clan, préfère investir des millions dans un chanteur étranger.
Ainsi va le Gabon en temps de transition : des choix incohérents, des priorités mal placées et une gestion qui ne laisse aucune place à l’honneur des véritables monuments culturels du pays. Si la transition ne peut pas offrir de réels changements dans ce secteur crucial, elle risque de devenir un miroir grossissant de l’inefficacité et de l’indifférence de ceux qui sont censés défendre les intérêts du peuple gabonais.
En attendant, Sima Mboula reste dans l’ombre, victime d’un système qui oublie trop vite ses héros.