Ce qui devait être une fierté nationale est devenu un scandale d’État. Le projet « Gab Pêche », voulu par le Président Brice Clotaire Oligui Nguema pour redonner aux pêcheurs gabonais leur souveraineté économique, est aujourd’hui éclaboussé par des révélations d’une gravité extrême. Lors d’une conférence de presse explosive tenue à Libreville, les pêcheurs affiliés aux dix coopératives bénéficiaires du programme ont rejeté avec force toutes les accusations portées contre la ministre de la Mer, de la Pêche et de l’Économie bleue, Laurence Ndong, et dénoncé ce qu’ils qualifient de « complot mafieux » orchestré par l’ancien directeur général de Gab Pêche, Hermann Omanda, et son complice Gabin Mapaga, conseiller à la présidence.
Lancé le 11 août 2025 en présence de la ministre Laurence Ndong représentant alors le Chef de l’État le projet « Gab Pêche » devait marquer un tournant historique en sortant les pêcheurs artisanaux de la marginalisation, en créant des emplois, en dynamisant la production halieutique nationale et en renforçant la souveraineté alimentaire du pays. Mais derrière cette ambition présidentielle se cachait un autre visage, celui d’un système de prédation et de corruption qui a progressivement pris le contrôle du projet. Selon les témoignages des pêcheurs, Hermann Omanda, nommé à la tête de la structure, a mis en place une gouvernance opaque et autoritaire, écartant les coopératives des décisions, imposant des paiements arbitraires, exigeant des contributions financières sans justification et multipliant les intermédiaires fictifs. Gabin Mapaga, usant de son influence à la présidence, aurait couvert ce système en invoquant abusivement le nom du Chef de l’État pour intimider ceux qui tentaient de contester.
À peine quatre semaines après le lancement, la première sortie en mer a été mystérieusement retardée. Une somme de 2 750 000 FCFA, destinée aux frais de sortie et à l’achat de matériel, s’est volatilisée sans explication. Lorsque les pêcheurs ont enfin pris la mer en septembre grâce à une intervention directe du ministère, la campagne a été un succès avec 2,2 tonnes de poissons capturées. Pourtant, Omanda a déclaré n’avoir vendu que 1,6 tonne. Résultat : les pêcheurs n’ont perçu que 40 % des recettes, soit 1 835 970 FCFA, tandis que près de 2,7 millions FCFA demeurent introuvables. À ce jour, aucun versement n’a été effectué à la BCEG pour rembourser le crédit du projet, et nul ne sait ce qu’il est advenu des fonds détournés.
Plus choquant encore, les pêcheurs affirment avoir été contraints de signer, de nuit et sous pression, un contrat les obligeant à rembourser 600 000 FCFA par mois et par pirogue pendant 18 mois, directement prélevés sur leurs maigres revenus. Dans le même temps, Omanda et ses proches se versaient des salaires exorbitants atteignant 16,5 millions FCFA par mois, soit plus de 80 % des recettes générées. « C’est nous qui risquons notre vie en mer, et eux qui récoltent l’argent », a dénoncé un membre de la coopérative COPEB.

les pêcheurs affiliés aux dix coopératives bénéficiaires du programme ont au cours de cette déclaration de presse, rejeté avec force toutes les accusations portées contre la ministre de la Mer, de la Pêche et de l’Économie bleue, Laurence Ndong
Face à la colère grandissante, la ministre Laurence Ndong est intervenue et a suspendu Hermann Omanda à titre conservatoire. Un directeur général intérimaire a été nommé, rétablissant un climat de transparence et de concertation dans la gestion du projet. Mais la chute d’Omanda et de son réseau n’a pas mis fin aux manœuvres. Une campagne de désinformation, orchestrée par ses soutiens, tente désormais de salir la ministre en l’accusant d’être responsable des dysfonctionnements. Une manœuvre que les pêcheurs dénoncent comme « la dernière carte d’une mafia aux abois ». « Nous rejetons catégoriquement toutes les accusations portées contre Mme Laurence Ndong. Elle a été notre principal soutien et la seule à défendre nos intérêts contre ce système de corruption. Sans elle, le projet Gab Pêche serait déjà mort », ont-ils déclaré devant la presse.
Derrière ce scandale se joue une bataille stratégique bien plus large. Gab Pêche n’est pas seulement un projet économique ; il est une pièce maîtresse de la stratégie présidentielle visant à nationaliser la filière halieutique et à la soustraire à l’influence étrangère. Saboter ce projet, c’est saboter cette vision nationale. « Nous ne laisserons personne voler un projet financé par l’argent du peuple. Les 700 pirogues promises par le Chef de l’État iront bel et bien aux pêcheurs gabonais », ont martelé les représentants des coopératives, accusant ouvertement Hermann Omanda et Gabin Mapaga d’avoir voulu transformer Gab Pêche en machine à détourner l’argent public.
Les pêcheurs annoncent désormais leur intention de porter plainte contre Hermann Omanda pour détournement de fonds et abus de confiance. Des documents comptables, des copies de décharges et plusieurs correspondances adressées au ministère auraient déjà été confiés à leurs avocats, prêts à être déposés devant la justice.
L’affaire Gab Pêche dépasse largement le cadre d’un simple scandale administratif. Elle met en lumière la manière dont un projet présidentiel financé par l’argent du peuple a été pris en otage par des intérêts privés déterminés à saboter une vision nationale. Grâce au courage et à la détermination des pêcheurs, la vérité éclate désormais au grand jour. L’État doit à présent transformer cette indignation en justice, car au-delà des détournements, ce sont la confiance du peuple, la souveraineté alimentaire et l’avenir même de la pêche artisanale gabonaise qui ont été trahis.


Ci-dessus , les salaires exorbitants atteignant 16,5 millions FCFA qu’Omanda et ses proches se versaient par mois, soit plus de 80 % des recettes générées












