Le Gabon attend toujours la présentation du projet de nouvelle Constitution, une réforme majeure qui suscite de vifs débats. L’une des propositions les plus controversées est la suppression du poste de Premier ministre, une mesure qui pourrait concentrer davantage de pouvoirs entre les mains du président. Cette perspective soulève des inquiétudes quant à la création d’un « hyper-président », susceptible de gouverner sans réel contre-pouvoir. Marc Ona Essangui, figure de la société civile et troisième vice-président du Sénat, a partagé son point de vue sur cette réforme lors d’une interview accordée à RFI.
Pour Marc Ona Essangui, la suppression du poste de Premier ministre est une recommandation du dialogue national inclusif d’avril dernier, et il est essentiel d’expérimenter de nouveaux systèmes de gouvernance pour asseoir une gestion crédible du pays. Il estime que si le système fonctionne, cela serait bénéfique pour le Gabon, mais il souligne également que, dans une démocratie, il est toujours possible de modifier la Constitution pour l’adapter aux réalités du moment.
Néanmoins, il reconnaît que l’hyper-présidentialisation du pouvoir, une tendance observée dans plusieurs pays africains, a souvent conduit à des dérives. Il rappelle les combats menés par la société civile contre les troisièmes mandats et les régimes autoritaires. Selon lui, les pouvoirs du président doivent être atténués par des contre-pouvoirs solides pour éviter toute dérive dictatoriale.
Marc Ona Essangui insiste particulièrement sur le renforcement du pouvoir judiciaire, qu’il considère comme le premier contre-pouvoir à établir. Un système judiciaire indépendant et au-dessus de tout est, selon lui, capable de garantir une gestion sereine du pays. Il évoque également l’importance d’un pouvoir législatif fort, capable d’interroger le président sur sa gestion, surtout en l’absence d’un Premier ministre pour défendre un programme devant les parlementaires.
Cependant, Marc Ona Essangui reconnaît qu’il est encore difficile de définir précisément les mécanismes qui seront mis en place pour garantir l’équilibre des pouvoirs. La mouture finale de la Constitution n’a pas encore été communiquée, et il reste attentif aux ajustements qui seront apportés par les rédacteurs du texte. Il rappelle que ce projet passera par le gouvernement et les deux chambres du Parlement, qui auront la possibilité de modifier certains éléments pour répondre aux attentes d’un Gabon en pleine transformation.
Alors que le pays attend avec impatience ce projet de nouvelle Constitution, Marc Ona Essangui alerte sur les risques d’un pouvoir absolu sans contre-pouvoirs efficaces, insistant sur l’importance de préserver un équilibre qui garantisse une véritable démocratie.